Avant de faire mes études et de travailler dans l’édition, je n’avais aucune idée de toutes les étapes nécessaires pour créer un livre. Je ne me rendais pas compte du nombre de personnes qui devaient intervenir dans son élaboration, du temps pour réaliser chaque tâche, de la quantité d’échanges auteur-éditeur, correcteur-éditeur, imprimeur-éditeur pour se mettre d’accord sur un texte, une couverture, un papier… Bref, comme pour toute activité ou tout métier, lorsqu’on passe derrière la scène et qu’on est sur le point de franchir la porte des coulisses, on ne sait pas très bien à quelle sauce on va être mangé. Entre excitation et peur de mal faire, il est presque normal d’avoir… le trac.
La plupart des autrices et des auteurs avec qui j’ai eu l’occasion de travailler en maison d’édition n’avaient que de vagues notions de la chaîne du livre et du travail éditorial. Et c’est bien normal puisqu’avant de songer à faire publier leur manuscrit, l’écriture constituait pour eux un loisir, un espace de création, une pause dans leur quotidien de comptable, professeur, aviateur…
Pour diverses raisons, depuis quelques années, de plus en plus de personnes ont recours à l’autoédition pour publier leurs écrits et sont donc amenées à s’intéresser à tous les aspects de l’édition, de l’écriture à la diffusion, en passant par la mise en page et la réalisation de la couverture. Tout comme le mot « livre » cache une pluralité d’intervenants et d’étapes, le mot « auteur » ne désigne plus au sens strict « une personne qui écrit un livre » (cf. Le Petit Robert), c’est devenu bien plus complexe.
Aujourd’hui, de nombreuses ressources en ligne apportent des informations permettant d’initier les auteurs aux différentes étapes qui jalonnent la fabrication d’un livre. L’auteur gagne en compétences, et ce qu’on voyait comme une activité de loisir tend à se professionnaliser puisque l’auteur autoédité est à la fois éditeur, maquettiste, comptable, diffuseur, distributeur… de son livre. Et tout cela, en plus d’exercer son métier principal et d’avoir une vie sociale et familiale.
Alors, si l’auteur autoédité est amené à pratiquer lui-même toutes les activités inhérentes à l’existence de son livre, les autres métiers de l’édition sont-ils amenés à disparaître ?
Je pense que non. Comme dans toute entreprise (au sens large), il faut savoir déléguer. Aimer le travail bien fait (ce qui est mon cas) ne signifie pas tomber dans l’excès de contrôle. Prendre le risque de tout vouloir faire soi-même peut rapidement mener à une forme de surmenage et provoquer une lassitude pour le projet. Il faut parfois un peu de temps pour assimiler les nouvelles connaissances, et savoir faire quelque chose ne signifie pas forcément aimer le faire.
Dans la publication d’un livre (mais pas que), le chemin me paraît tout aussi important que le résultat. Ce sont toutes les relectures, tous les questionnements liés à la syntaxe, au choix du format du livre, de l’illustration de couverture, etc. qui me paraissent primordiaux. Et pour qu’il y ait des réponses à ces questionnements que l’auteur se pose sur son travail, pour faire face aux montagnes d’incertitudes qui jalonnent le parcours de la publication d’un livre, l’Autre est nécessaire. Le dialogue, les échanges d’idées, les contradictions font partie du voyage. Travailler seul est possible, mais pour quel résultat ? Et surtout, par et pour quel chemin ?
Si vous envisagez de vous lancer dans l’aventure de l’autoédition, je ne peux que vous conseiller de réfléchir au projet de manière globale : quelles compétences pouvez-vous mobiliser et lesquelles sont à développer ? quelles sont les tâches que vous aimez et n’aimez pas faire ? quel temps pouvez-vous consacrer au projet et quel budget ? Cela vous permettra de définir ce que vous pourriez éventuellement déléguer pour alléger votre travail et conserver le plaisir de créer et la fierté d’avoir publié votre livre.
Komentarai